Plus qu'une douloureuse déconvenue d'épouse mal-aimée, c'est en effet toute son identité de femme qui semble se jouer alors. Celle que son mari affublait des sobriquets "alouette", "écureuil" ou encore "frêle colombe" estime avoir toujours été traitée comme "un gentil petit animal sans défense" : "J'étais constamment tenue à l'écart des conversations sérieuses, réservées aux hommes, autour d'un cigare bien sûr ! Je n'étais bonne pour ma part qu'à sourire, être aimable, dorloter les enfants, et minauder. Je vivais dans une maison de poupée." Ce rôle de femme-enfant, Nora Helmer n'en veut plus, et claque la porte. Lorsqu'on lui demande si elle se sent féministe, elle marque son étonnement : "Je ne sais même pas dire exactement ce qu'est le 'féminisme'. J'y vois pour ma part une cause qui concerne l'humain en général, une démarche plus humaniste que particulière." C'est pour cette raison que, malgré les diverses sollicitations, elle ne milite dans aucun mouvement, préférant conserver son indépendance. Les épaules se relâchent, Nora Helmer allume une cigarette et s'installe plus confortablement dans le sofa avant de poursuivre : "La Brooklyn School for Women n'est pas un bastion du féminisme. Elle doit avant tout être un lieu de culture. L'émancipation des femmes ne peut passer que par le savoir et la liberté de penser, mais cela concerne tout autant l’ensemble de la société." C'est en effet à travers la culture que Nora Helmer a réussi à se construire, en tant que femme, mais surtout en tant qu'individu.







