l'enfance le poussent vers le cinéma, comme spectateur d'abord, puis comme créateur. "J’avais peu d’amis, confie-t-il à Mark Salisbury, mais il y a suffisamment de films étranges pour que tu puisses te passer d'avoir des amis pendant un sacré bout de temps." De toute évidence, le monde aseptisé de Burbank ne lui convient pas : "Adolescent, j'avais énormément de mal à communiquer avec le reste du monde, à lier des relations avec les autres, et ma personnalité n'avait rien à voir avec l'impression que je donnais – un sentiment assez répandu. Je me trouvais, comme tant d'autres, dans l'impossibilité d'exprimer les sentiments que j'éprouvais". Ce qui le caractérise avant tout, semble-t-il, c'est une certaine dualité, que l'on retrouve aisément dans les personnages étranges qui peuplent sa filmographie, des êtres à plusieurs facettes dont l'ambivalence est parfois figurée littéralement. Ainsi, à propos de l'apparence de Sally dans l'Etrange Noël de Monsieur Jack (1993), le réalisateur précise : "Mon esprit était obsédé par tout ce qui était suturé à l'époque. J'étais en plein "trip" Catwoman, et j'étais particulièrement intéressé par les personnages "rapiécés". Cette imagerie symbolique cherchait à traduire un état d'âme. Ce sentiment de ne pas être un tout, d'être composé de morceaux épars et de devoir, pour ainsi dire, rassembler ses esprits en permanence m'interpellait – et m'interpelle toujours – considérablement. Il s'agit bien plus d’une métaphore que d’un hommage à Frankenstein."
raphique, s'entourant de gens qu'il apprécie et qui semblent le comprendre, selon ses propres mots, comme le compositeur Danny Elfman et le comédien Johnny Depp, mais aussi sa compagne Lisa Marie, qui apparaît dans tous ses films durant leur relation, puis l'actrice Helena Bonham Carter, sa compagne actuelle et mère de son fils Billy.
un homme à se déguiser en chauve-souris? - délaissant la veine kitsch notamment exploitée dans la version télévisée des aventures du justicier masqué. De même, en tant que grand fan de La Planète des singes, tenter une nouvelle version du film devient pour lui une sorte de défi, de tentation empoisonnée à laquelle il finit par succomber.
expliquer et décrypter son travail. Il ne cesse de le répéter dans les entretiens : si les spectateurs - et les critiques - voient dans son oeuvre des motifs récurrents, comme les rayures noires et blanches, ou des références cinématographiques, peu de ses choix artistiques sont conscients. Ces éléments surgissent après-coup, ce qui n'empêche pas son univers de suivre certaines règles, fondées d'abord sur un travail colossal sur le visuel. Venant de l'animation, Burton passe par les images, qui, selon le cinéaste, disent la vérité, et non pas par les mots, qui mentent. Ainsi, l'abondance de croquis et de dessins qu'il produit sont comme une caméra branchée sur son inconscient, duquel émergent un certain nombre de motifs provenant parfois de son enfance ou de souvenirs personnels - c'est le cas des chiens, qui abondent dans ses films, ou des décors de banlieue qui rappellent Burbank -  ou bien des films qui ont fondé son imaginaire dans son enfance, au premier rang desquels les films fantastiques de la Hammer, les films japonais comme Godzilla, et toute une esthétique de cinéma Bis qui va irriguer en profondeur sa propre cinématographie. Plus encore, ce que Burton recherche, c'est insuffler la vie à l'inerte, syndrôme de Frankenstein qui ne cesse de hanter ses films. C'est même la raison pour laquelle il a, dans un premier temps, choisi l'animation image par image, qui a "une énergie indéfinissable, car elle permet d’insuffler réellement la vie à ce qui est inanimé". Une façon, sans doute, de résumer sa démarche cinématographique : non pas créer un univers fictionnel systématique et cohérent mais exprimer ses émotions, ses angoisses et les contradictions qui l'habitent. Rien d'étonnant à ce que son instinct premier se tourne vers le croquis qui saisit dans l'instant une image - non pas ce qu'il voit, mais ce qu'il imagine. Et qu'il mette ensuite bout à bout ces croquis, vingt-quatre par secondes.








