L`Intermède
Exposition Nouveaux Monstres Lille Gare Saint-SauveurNouveaux monstres, vieilles chimères
Morceau du programme Lille 3000, l'exposition Nouveaux Monstres, riche et originale, confirme le statut de haut lieu culturel de Lille en France, cinq ans après son titre de "Capitale Européenne de la Culture" en 2004.

Au centre de la ville, installées dans l'ancienne Gare Saint Sauveur, transformée depuis en espace d'exposition, quinze installations monstrueuses et contemporaines – la plus ancienne remonte à 2005 – rythment le temps de l'exposition Nouveaux Monstres, aussi ludique qu'interactive. Nuls discours théoriques ou cartels explicatifs : l'appréciation des œuvres se fait sans intermédiaire, grâce aux guides qui viennent à la rencontre des visiteurs pour les mener vers ces "nouveaux monstres". Le thème ouvert de l'exposition permet une hybridité des genres et des disciplines, touchant autant l'ouïe que la vue et le toucher. L'interactivité est facilitée par le numérique et les interfaces technologiques, l'objectif étant de faire participer le visiteur, petit ou grand, à chaque instant.

Le monstre familier
Au seuil de l'exposition, les contes de notre enfance. La galerie des monstres s’ouvre sur des portraits de famille, comme cette grande-tante qui nous regarde de haut. Cohorte de photographies de corps difformes, et cortège de tableaux hantés - Lowbrow And Horror Art de Mia Mäkilä -, parmi des trophées animaliers Exposition Nouveaux Monstres Lille Gare Saint-Sauveurmouvants et vindicatifs - Hunting Trophies de France Cadet. L'imagerie traditionnelle du monstre – une vilaine bête tapie dans le noir qui attend l'extinction des lumières pour faire son apparition –, ne semble plus faire peur à grand monde depuis Harry Potter et ses tableaux de personnages vivants, ou encore Monster&Co et ses monstres toutes fourrures dehors. La désacralisation du monstre est d’ailleurs entamée lorsque Pierrick Sorin nous dévoile avec son diptyque Dégoulinures comment créer une vision d'horreur avec trois bouts de ficelles.

Mais l'exposition intrigue davantage lorsqu'elle invite le visiteur vers des territoires inconnus. Il se promène alors au milieu de la forêt de Scénocosme qui réagit à chacun de ses mouvements, le moindre frôlement de l'une des plantes déclenchant une douce musique lancinante. Il peut aus
si se perdre dans la vallée de robot-araignées - Hysterical Machines de Bill Vorn - dont les mouvements chaotiques et désordonnés interpellent par la cacophonie de cliquetis. Ce ballet lumineux d'êtres de ferraille tantôt immobiles, tantôt frénétiques, transforme la ballade en aventure, lorsque se pose la question d'aller les toucher... ou de les éviter.
Exposition Nouveaux monstres Lille 3000 gare saint sauveur
Même sous verre, les paysages miniatures étonnants de précision de Mark Powell – Dream Diorama – n'en sont pas moins inquiétants : ils se laissent scruter comme autant de scènes angoissantes et fourmillantes qui ne sont pas sans rappeler les tableaux du peintre médiéval Jérôme Bosch. La minutie du travail renforce l'impression de malaise, prouvant qu'il n'y a pas besoin de se promener dans ces paysages pour être happé par leur force d'évocation.

Le côté monstrueux de la force
Plus loin, le spectateur revêt le costume du monstre. Shadow Monsters de Philip Worthington projette ainsi l'ombre chinoise des visiteurs sur un grand mur blanc, et fait surgir des formes aléatoires qui font de ces doubles de ténèbres de véritables créatures fantasmagoriques. Et le grand écran de Boris Debackere, Probe, est une épopée au cœur de l'infiniment petit et de l'infiniment grand, les pas des visiteurs guidant le voyage.

L'immersion se fait plus violente avec Dans La Tête Du Monstre, de Francois Chalet, robot japonisant qui reprend les codes du manga et ses traits exagérés. Les visiteurs entrent par l'arrière de la tête, et se retrouvent dans l'esprit de la créature. L’oeuvre se met alors en mouvement, et Exposition Nouveaux Monstres Lille Gare Saint-Sauveurcommence son travail de destruction. A travers les hublots qui lui servent d'yeux, la vision de foules paniquées fuyant le monstre et les immeubles s'effondrant sous ses coups. Rires, excitation et fascination. Les monstres ne nous sont pas si étrangers qu'on le croit.

Étienne Bauchet, à Lille
Le 03/10/09







Exposition Nouveaux Monstres Lille Gare Saint-Sauveur
Nouveaux monstres, jusqu'au 8 Novembre 2009
Gare Saint Sauveur
Boulevard Jean-Baptiste Lebas
59000 Lille
Mer-Dim : 11-19h
Nocture le jeudi (21h)
Entrée libre
Rens. : 03 20 31 30 00







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Légendes photos :
Vignette sur la page d'accueil Hysterical Machines, Bill Vorn (Canada), 2006
Photo 1 Lowbrow and horror art, Mia Mäkilä (Suède), 2008-2009
Photo 2 Shadow Monsters, Philip Worthington (Grande-Bretagne), 2005
Photo 3 Dream Diorama, Mark Powell (Australie), 2005
Photo 4 Dans la tête du monstre, François Chalet et Mathias Vetter (Suisse), 2009
Photo 5 Probe, Boris Debackere (Belgique), 2008