L`Intermède
Le choix de la rédaction de L`Intermède

Gloria
José Montalvo
En tournée jusqu'au 22 mai 2022



En deux mots

"Tout est foutu, soyons joyeux." D’emblée, le ton est donné et, en partisan de l’éternelle allégresse, José Montalvo ne nous déçoit pas. Avec Gloria, sa nouvelle création dansée en ce moment au théâtre des Gémeaux à Sceaux, le chorégraphe s’attache à conjurer le désespoir tout en rendant hommage à la force de ceux qui osent défier le monde et à l’audace des corps qui refusent les limites.
 
Comme à son habitude, pour cette nouvelle pièce, José Montalvo se plaît à mélanger les genres. Sur une musique adaptée des Quatre saisons de Vivaldi, le spectateur voit défiler, danser et se fondre des artistes d’horizons divers : flamenco, danse classique, hip hop, break dance et danse africaine sont autant de styles dans lesquels le chorégraphe puise, invitant chaque danseur à se saisir d’un folklore qui n’est pas le sien.

gloria, danse, jose montalvo, folkore, break dance, flamenco, danse classique, hip hop, bailaoara, choregraphieOn voit alors une danseuse classique épouser les mouvements d’un breakeur, une bailaoara enchaîner les déboulés et l’ensemble de la troupe reprendre en chœur un chant traditionnel de Côte d’Ivoire ou enfiler des chaussures de flamenco pour se lancer dans une buleria endiablée. D’une influence à l’autre, il devient même parfois difficile de discerner qui se réclame de quel milieu. C’est que dans Gloria, tout est avant tout question de partage et de fierté. En effet, le chorégraphe a construit sa création autour d’interventions des artistes qui, un à un, font cesser le bal pour prendre la parole. A chaque fois, le propos est le même : celui d’une passion reniée ou contrariée par l’entourage, mais pour laquelle les danseurs n’ont jamais cessé de lutter. "Toi, tu es trop grosse", "Toi, tu es trop petite", "Tu veux faire de la danse, tu feras l’armée", "Tu n’y arriveras jamais", "Tu veux donc être pauvre ?" Et la réponse, toujours la même elle aussi : "Aujourd’hui, je suis fier.ère de danser", danser comme un homme, danser seins nus, danser en refusant la virtuosité, danser à l’aveugle mais danser sans cesse et donner à voir la joie immense qui s’empare des corps libérés des carcans de la société.

De fait, José Montalvo en a conscience – qui pourrait l’ignorer d’ailleurs – le XXIe siècle va mal et le désastre guette une humanité qui étouffe encore de préjugés et qui n’a pas su préserver son habitat. Mais il refuse de baisser la tête : face à la destruction, il n’y a qu’une résignation possible, celle de faire de son quotidien une fête. "Rassurez-vous, tout va mal" et "La joie de vivre est infinie" deviennent alors ses mots d’ordre, imprimés sur un journal plié dont l’image est projetée sur grand écran en fond de scène. Comme le spectateur le comprend à la fin du spectacle, cette pièce d’origami dont il ne voit au début qu’une extrémité, c’est une barque en papier. Et puisque nous sommes tous dans le même bateau et que l’eau monte dangereusement, alors vivons, crions, luttons, bref, dansons !
 
-----------------------------
À Paris, le 26 septembre 2021




Gloria
de José Montalvo
Maison de la Danse de Lyon, du 15 au 17 décembre 2021
Festspielhaus St. Pölten, le 28 janvier 2022
Le Channel, Calais, les 25 et 26 février 2022
Le Carré, Sainte Maxime, le 14 mai 2022
Théâtre de Caen, du 18 au 22 mai 2022


Crédits photo : ©Patrick Berger

Le dernier article de la rubrique Scènes

danse, adi boutrous, theatre de la ville, identite, israel, Ariel Gelbart, Jeremy Alberge, Uri Dricker, chorégraphie, corps social, maculinité, alterite, rencontre
Tous les choix de la rédaction de L`IntermèdeTous les choix de la rédaction de L`Intermède