

 CÔTÉ CRAYONS et fusains, Ernest Pignon-Ernest approche les plus grands maîtres du dessin réaliste classique et travaille sous l’influence affichée du Caravage. En témoignent les corps de femmes drapées, exposés dans la chapelle du musée d’Art et d’Histoire de Saint-Denis pour l’intervention intitulée Extases en 2010. Dessinés au fusain sur de grandes feuilles blanches, les personnages semblent sculptés par l’ombre et la lumière, modelés par un travail sur les contrastes qui rend avec force l’ardeur de leur enthousiasme. Abordée avec plus de douceur mais non moins de virtuosité, une étude pour La Virgilienne, réalisée à la pierre noire en 1994 manifeste tout le raffinement des traits du dessinateur.
CÔTÉ CRAYONS et fusains, Ernest Pignon-Ernest approche les plus grands maîtres du dessin réaliste classique et travaille sous l’influence affichée du Caravage. En témoignent les corps de femmes drapées, exposés dans la chapelle du musée d’Art et d’Histoire de Saint-Denis pour l’intervention intitulée Extases en 2010. Dessinés au fusain sur de grandes feuilles blanches, les personnages semblent sculptés par l’ombre et la lumière, modelés par un travail sur les contrastes qui rend avec force l’ardeur de leur enthousiasme. Abordée avec plus de douceur mais non moins de virtuosité, une étude pour La Virgilienne, réalisée à la pierre noire en 1994 manifeste tout le raffinement des traits du dessinateur. "TOUTES MES INTERVENTIONS depuis cinquante ans maintenant naissent d’une nécessité, d’une exigence, parfois ressenties comme vitales ; d’un désir, d’un besoin d’interroger telle réalité, tel problème ressentis comme essentiels. Toujours quelque chose de personnel qui me donne l’énergie de m’investir." Ainsi, même si l’expression ne lui plaît guère, Ernest Pignon-Ernest est sans conteste un artiste engagé. En 1971, il dénonce les ravages des répressions pendant la Commune en déroulant sur l’escalier du Sacré-Cœur un tapis de gisants. En 1974, il proteste contre le jumelage entre Nice, sa ville natale, et Le Cap : la même famille de Sud-Africains noirs parqués derrières des barbelés s’affiche alors en série sur les murs de la ville, rappelant aux promeneurs les hontes de l’Apartheid. En 2012, il investit les murs de la prison Saint-Paul à Lyon : il dessine un suaire comme épinglé à des barbelés, bien réels eux ; plus loin, toujours aux barbelés, pendent des dizaines de bouteilles dont la plupart renferment des crânes ou des visages grimaçants ; dans la cour, enfin, un homme nu – Ecce homo –  semble reproduit à l’infini. Tous ces dessins photographiés in situ disent la misère du monde carcéral et les infernales rédemptions qui s’y jouent. Marie-José Mondzain ne s’y trompe pas, qui écrit : "Je crois que tu agis sur un espace de ruptures et d’oublis, parfois même de deuil, de douleur ou de trahison." Certes, toutes les interventions d’Ernest Pignon-Ernest ne sont pas aussi explicites que ces trois-là, pourtant, chaque dessin collé par l’artiste résonne comme un cri ou du moins un appel à voir et à se questionner : "je crois qu’on ne peut pas intervenir dans l’espace public sans quelque chose de l’ordre du sens civique", remarque-t-il. Toute une vision du monde se livre alors dans le coffret De traits en empreintes, vision complétée et soutenue par quelques clichés plus personnels qui ouvrent une autre fenêtre sur l’univers du dessinateur.
"TOUTES MES INTERVENTIONS depuis cinquante ans maintenant naissent d’une nécessité, d’une exigence, parfois ressenties comme vitales ; d’un désir, d’un besoin d’interroger telle réalité, tel problème ressentis comme essentiels. Toujours quelque chose de personnel qui me donne l’énergie de m’investir." Ainsi, même si l’expression ne lui plaît guère, Ernest Pignon-Ernest est sans conteste un artiste engagé. En 1971, il dénonce les ravages des répressions pendant la Commune en déroulant sur l’escalier du Sacré-Cœur un tapis de gisants. En 1974, il proteste contre le jumelage entre Nice, sa ville natale, et Le Cap : la même famille de Sud-Africains noirs parqués derrières des barbelés s’affiche alors en série sur les murs de la ville, rappelant aux promeneurs les hontes de l’Apartheid. En 2012, il investit les murs de la prison Saint-Paul à Lyon : il dessine un suaire comme épinglé à des barbelés, bien réels eux ; plus loin, toujours aux barbelés, pendent des dizaines de bouteilles dont la plupart renferment des crânes ou des visages grimaçants ; dans la cour, enfin, un homme nu – Ecce homo –  semble reproduit à l’infini. Tous ces dessins photographiés in situ disent la misère du monde carcéral et les infernales rédemptions qui s’y jouent. Marie-José Mondzain ne s’y trompe pas, qui écrit : "Je crois que tu agis sur un espace de ruptures et d’oublis, parfois même de deuil, de douleur ou de trahison." Certes, toutes les interventions d’Ernest Pignon-Ernest ne sont pas aussi explicites que ces trois-là, pourtant, chaque dessin collé par l’artiste résonne comme un cri ou du moins un appel à voir et à se questionner : "je crois qu’on ne peut pas intervenir dans l’espace public sans quelque chose de l’ordre du sens civique", remarque-t-il. Toute une vision du monde se livre alors dans le coffret De traits en empreintes, vision complétée et soutenue par quelques clichés plus personnels qui ouvrent une autre fenêtre sur l’univers du dessinateur.


