L`Intermède
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L'ACTEUR, RÉALISATEUR et propriétaire d'un ranch au Texas, Tommy Lee Jones, était à Cannes cette année pour présenter son nouveau long métrage. Produit par Luc Besson, qui avait déjà accompagné le premier film de l'Américain, The Homesman plonge dans la rudesse et la solitude du Nebraska au moment de la conquête de l'Ouest. Loin des clichés triomphants, il dessine le chemin d'un retour vers l'Est pour des femmes devenues folles qui ne peuvent plus être prises en charge par leur communauté et que l'on décide de renvoyer vers leur famille. Et c'est une autre femme (Hilary Swank) qui les emmène dans ce voyage de cinq The Homesman, Tommy Lee Jones, Hilary Swank, Miranda Otto, Festival de Cannes, Western, femmes, folie, film historique, cannes, festival, critique, interview, analyse, photo, photos, image, imagessemaines vers l'Iowa. Western hors du commun que Tommy Lee Jones voit avant tout comme un film historique, The Homesman prend à rebours le rêve américain pour dévoiler l'aspérité et la violence d'un monde hostile et le courage d'une femme indépendante.

Par Claire Cornillon


NEBRASKA, 1854. Une immense étendue plate et vide. Elle laboure son champ avec ses chevaux. Elle met la table, cuisine, balaie, puis se coiffe, va chercher de l'eau. Miss Cuddy, rude et solitaire, est de ces femmes pionnières qui ont tenté l'aventure seule. Elle gère sa terre et sa vie d'une main ferme, même si elle ne serait pas contre trouver un mari qui l'accompagnerait dans ce labeur quotidien. Lorsque plusieurs femmes de la communauté perdent l'esprit et qu'il est décidé qu'elles doivent être ramenées à l'Est, elle s'impose comme la femme de la situation. Et sur le chemin, elle sauve la vie de George Briggs, attaché à un arbre pour avoir occupé une maison qui n'était pas la sienne. Ils entreprennent le voyage ensemble, ne pouvant compter que sur eux-mêmes dans cet univers hostile.


Brut

"MON FILM parle pour lui-même", répondait le réalisateur à toute question portant sur l'interprétation de son oeuvre lors de la conférence de presse. De fait, le point de vue qu'il adopte n'apparaît pas au premier regard. On pourrait s'étonner de certains partis pris, concernant la représentation des Indiens par exemple ou le destin final de Miss Cuddy. Mais The Homesman est un film qui s'éprouve d'abord et auquel on repense par la suite, qui ne se comprend qu'après une prise de recul par rapport à la violence d'un réel qui s'impose à travers l'écran. Tommy Lee Jones offre une vision brute des événements, sans les commenter. Au spectateur ensuite à se positionner par rapport aux images. Exactement comme les personnages du film The Homesman, Tommy Lee Jones, Hilary Swank, Miranda Otto, Festival de Cannes, Western, femmes, folie, film historique, cannes, festival, critique, interview, analyse, photo, photos, image, imageslivrés à eux-mêmes dans un monde où il n'y a pas de ligne directrice, pas de règle et pas de but, du moins positif. Ils subissent les situations dramatiques dans lesquels ils sont embourbés et tentent de survivre comme ils le peuvent. Le monde est là, brut, sans vision téléologique. C'est dans cette déconstruction du mythe américain de la conquête de l'ouest que le film prend tout son sens.

L'OUEST SAUVAGE l'est parce qu'il est d'abord inhumain, et que l'homme qui y vit n'a aucune structure à laquelle se raccrocher pour affirmer son humanité. Il n'y a que l'individu qui doit porter la responsabilité de ses propres valeurs aussi loin qu'il a la force de le faire. La solitude radicale de ces immensités vides impose de ne compter que sur soi-même. Et lorsque Miss Cuddy reste en arrière pour enterrer un corps abandonné là et lui donner un dernier refuge plus digne, elle se trouve soudain sans aucun repère, seule avec son cheval, sans nourriture et sans abri, sans aucun recours. Même la vie quotidienne, au sein de la famille, ou dans la communauté, certes réduite à quelques individus, les expose à des difficultés insurmontables. Le travail de la terre est éreintant, les fermes sont isolées, minuscules cabanes au milieu du désert ou même, quand il n'y a pas de bois, trous dans le sol assortis de murets de briques. À part le rêve d'un nouveau départ, qui n'apparaît jamais dans le film, les personnages ne semblent avoir aucune perspective.


À CE TITRE, la conception même du film, fait de transitions brutes, inattendues, qui imposent des flashbacks sans prévenir, comme des visions de cauchemar pourtant bien réelles, relève de cette rudesse. La brutalité et la violence de l'histoire de chacune de ces femmes ne trouve pour réponse que l'austérité du The Homesman, Tommy Lee Jones, Hilary Swank, Miranda Otto, Festival de Cannes, Western, femmes, folie, film historique, cannes, festival, critique, interview, analyse, photo, photos, image, imageschemin à parcourir. Et lorsque Briggs doit faire un choix, il n'est pas certain qu'il n'abandonnera pas ces femmes, qui ne peuvent pourtant survivre sans lui.


Film de femmes

SI BIEN QUE le film n'est pas une marche vers l'Ouest mais bien un retour à l'Est pour des femmes épuisées dont la dureté de la vie est venue à bout. Film de femmes, ironiquement intitulé The Homesman - "l'homme de confiance", rôle qui est attribué précisément à Miss Cuddy, une femme -, le dernier long métrage de Tommy Lee Jones est aussi pour lui une manière de montrer comment s'est construite petit à petit l'avancée de la place de la femme dans la société, par le courage de pionnières, dans tous les sens du terme, qui ont osé penser qu'elles pouvaient exister sans un homme. Et même si le personnage qu'incarne Tommy Lee Jones est peut-être le fil directeur du film, celui qui en assure la continuité, il n'est là précisément qu'à côté de toutes ses femmes aux destins divers : les femmes brisées qui ont perdu l'esprit, la femme forte et indépendante qui cherche à se construire une existence en phase avec ses valeurs, et la femme généreuse et bienveillante incarnée par Meryl Streep qui est au bout du chemin pour accueillir ceux qui parviendront jusqu'à elle. D'ailleurs, c'est bien parce que les hommes ne peuvent plus s'en occuper qu'ils se déchargent de leurs malades sur Cuddy et Altha Carter. D'une femme à une autre femme.

À CANNES, TOMMY LEE JONES a parlé des recherches effectuées pour le film, au-delà de l'adaptation du roman de Glendon Swarthout 
lui-même. Un ouvrage sur la folie au XIXe siècle a ainsi beaucoup inspiré le cinéaste, ainsi que des photographies d'époque de femmes. On comprend alors que si l'on associe le film au western par son ancrage spatio-temporel, son projet ne s'inscrit pourtant en aucun cas dans un travail sur les codes du genre. "Je ne pensais pas au western, ou à des genres, mais à l'histoire américaine", explique-t-il. C'est ainsi que l'attention à certains détails déconstruit la vision d'un Ouest que l'on a si souvent vu sublimé par le genre. D'une Amérique presque immuable et homogène dans le rêve qu'elle a imposé à son origine, le film révèle la diversité des situations, concrètement, dans la diversité des langues, des nationalités des pionniers, et des parcours. Tommy Lee Jones dit avoir réalisé un film historique, qui se situe dans l'Ouest, mais il le fait à contre-courant de toute idéologie de l'Ouest. Le réalisateur soulignait d'ailleurs l'importance de la question de l'impérialisme des The Homesman, Tommy Lee Jones, Hilary Swank, Miranda Otto, Festival de Cannes, Western, femmes, folie, film historique, cannes, festival, critique, interview, analyse, photo, photos, image, imagespionniers qui se sont appropriés ces terres dans sa conception première du film. C'est un film de la frontière mais d'une frontière infranchissable, peut-être d'un échec. Toutes les dynamiques engagées meurent violemment ou lentement et si elles persistent, il ne nous en est rien dit. 

C. C. 
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à Cannes, mai 2014

The Homesman, western de Tommy Lee Jones
Avec Hilary Swank, Tommy Lee Jones, Miranda Otto...
2h02
Sortie le 18 mai 2014

Festival de Cannes 2014, sélection officielle, en compétition


Cet article fait partie de notre dossier spécial Cannes 2014

 
 



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