
CE QUI FRAPPE AVANT TOUT, dans l'œuvre prolifique de ce peintre Vénitien, c'est la douceur et la sérénité qui se dégagent de ses personnages. Virtuose dans le maniement de l'huile, Cima parvient à restituer sur ses toiles des détails d'une précision extrême et, par là même, explique Cécile Maisonneuve, à traiter "avec un soin fascinant les visages, les séquelles laissées par le temps, les expressions et les regards, qui donnent à ses peintures une profonde humanité". Qu'il s'agisse de ses Vierge à l'Enfant ou des saintes des grands retables, les visages de ces femmes dégagent une poésie aussi intense que ceux d'un Botticelli.
CETTE TECHNIQUE DE MODELAGE par la couleur bénéficie aussi à son célèbre Saint Sébastien, à ceci près que ce n'est plus du tissu dont il est cas dans cette huile, mais de la chair même du saint, qu'un travail sur l'ombre et la lumière parvient à dessiner subtilement. Ainsi modelé, le corps du saint frappe d'autant plus qu'il se détache d'un lumineux fond bleu que quelques nuages épars rendent presque tangible. Tout le talent de coloriste de Cima tient là : donner corps à la peinture en jouant de glacis et de touches discrètes. Une étude en laboratoire indique d'ailleurs que ce qui distingue le maître de ses disciples est la finesse et la précision avec lesquelles il superpose les couches de peinture formant les yeux de ses personnages. Une touche de lapis-lazuli sur de l'azurite lui suffit alors pour donner vie et humanité aux regards d'un saint Jacques ou d'un saint Roch.
poésie, l'atmosphère argentée et légère de la Vénétie". Avec de tels talents, il n'y a donc nulle surprise à ce que le jeune Giovanni Battista Cima, enfant d'une famille d'artisans peu prédestiné à une grande carrière, devienne pourtant dès les années 1490 un peintre reconnu. Considéré très tôt, grâce à ses grands retables et à ses Vierges à l’Enfant, comme le maître incontesté de l'art sacré vénitien, il a su rivaliser avec Bellini et Giorgione et influencer par la suite de nombreux peintres italiens.


