L`Intermède
Le choix de la rédaction de L`Intermède

La Gioia
Théâtre du Rond-Point, Paris
Jusqu'au 20 octobre 2019



En deux mots

Une consolation à écrire encore et encore. Un hommage poétique. Un long sanglot pailleté d’espoir. La Gioia de Pippo Delbono, c’est tout cela à la fois. Pensée après la mort de Bobò, un ami et membre de sa troupe, la nouvelle création de l’auteur et metteur en scène italien s’annonce d’emblée comme une épitaphe et un remède, un cheminement artistique pour raviver la mémoire comme pour pallier l’absence de celui qui fut un porteur de joie.
 
Si la pièce s’ouvre avec la bonne humeur du « Don’t worry be happy » de Bobby MacFerrin au rythme duquel un jardinier clownesque fait jaillir des nouvelles fleurs à chaque fois qu’il arrose le carré de gazon jonchant le centre de la scène, la joie qui s’affiche dès le titre comme le thème de la pièce est loin d’y être acquise. la gioia, theatre du rond-point, pippo delbono, bobo, hommage, joie, deuil, theatre italienC’est qu’elle n’est pas un fait, une chose établie. Pour Pippo Delbono, elle est une étincelle évanescente, une fulgurance que chacun rencontre nécessairement sur son chemin, mais ce chemin peut être long. C’est ce que comprend très vite le public embarqué par les émotions de l’artiste qui prend très tôt la parole pour expliquer l’origine de son spectacle et brosser le portrait de ce Bobo pour et autour duquel il est construit. Happé par la très belle voix de Pippo Delbono et par la puissance poétique du texte qu’il lit et récite tour à tour, le spectateur est tiraillé entre le récit presque désespéré de l’auteur et la mise en scène d’une série de tableaux souvent légers où défilent les membres de la troupe, clowns et danseurs d’un cirque qui vient de perdre son Auguste. Ces comédiens à qui Pippo Delbono décide de ne pas ou peu donner la parole – leur substituant sa propre voix, des enregistrements de celle de Bobò et une bande musicale mêlant tango, musique sacrée ou composition électro – apparaissent comme autant d’incarnations d’une joie qui parfois tarde et peine à se laisser débusquer mais finira toujours par advenir. Ainsi, comme chaque fleur connaît sa saison et finira nécessairement par éclore, chacun des tableaux qui accompagnent le récit de Delbono nous offre un rayon de joie en contrepoint du deuil : une femme qui danse le tango, un travesti chantant de tout son cœur, un homme qui couvre la scène de bateaux en papier ou encore des gerbes de fleurs qui, posées sur un tapis de feuilles mortes, traversent tout le plateau et dessinent, dans la composition finale, un chemin de printemps par-delà la mélancolie de l’automne.

Bien que l’ensemble s’avère inégal et que certains tableaux paraissent peu convaincants, il n’en demeure pas moins que l’émotion est profonde et le propos d’une terrible et belle justesse : tout homme rencontre ses peines et ses pleurs mais il n’est exclu pour aucun de croiser, même un instant seulement, le chemin de la joie sur lequel, à la clôture du spectacle, tous les membres de la troupe dansent en farandole. Un hommage poignant à un être cher, au théâtre qui fut son monde et à la vie elle-même.
 
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À Paris, le 15 octobre 2019



Sur le spectacle

Dates de la tournée internationale


La Gioia
de Pippo Delbono
Théâtre du Rond-Point
2 bis avenue Franklin D. Roosevelt, Paris 8e
Jusqu'au 20 octobre 2019
Mar-sam 21h
Dim 15h

Tarif plein : 38 €
Tarifs réduits : de 12 à 28 €

Rens. : 01 44 95 98 21

Crédits photo : Luca del Pia

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