L`Intermède

#1 Des hommes et des couleurs

Elles sont partout. Elles font le monde des hommes qui les cherchent, les recréent, les inventent. Pourtant, il n'y a comme rien à en dire. Sauf à se pencher sur les travaux de Michel Pastoureau, spécialiste de l'histoire médiévale et archiviste paléographe, qui oeuvre depuis les années 1980 au service des couleurs. Prix Médicis essai 2010 pour son ouvrage Les Couleurs de nos souvenirs, l'auteur est un ancien de l'Ecole des Chartes qui connaissait les pinceaux mais qui a décidé de les faire parler. A la suite d'une quarantaine d'ouvrages consacrés à l'histoire de l'héraldique, des couleurs et des symboles, Michel Pastoureau fait paraître à l'automne 2010 un recueil magistral de 350 photographies. Après la théorie, le catalogue, sobrement intitulé Couleurs, permet d'aborder les couleurs l'une après l'autre, et d'en révéler toute la complexité.

Pour le philosophe Maurice Merleau-Ponty, chaque fragment de monde recèle une série de variantes possibles et peut rappeler d'autres instants. Tout ce qui est visible et vu est un "rayon de monde". Plus qu'une expérience visuelle, parcourir l'ouvrage élaboré par Michel Pastoureau est sans doute l'une des façons les plus fortes d'éprouver ce que le phénoménologue cherchait à dire. Le temps d'un dialogue silencieux, les instantanés, parfois empruntés à de célèbres noms tels que Martin Parr ou Patrick Zachmann, s'offrent à de nouveaux témoins. Rouge, vert, noir, jaune, bleu et blanc, Michel Pastoureau hérite de l'éventail chromatique en vigueur depuis Aristote. Une cinquantaine de photographies est ainsi consacrée à chacune des six couleurs, précédée d'une brève explication sur leur sens et leur histoire. Mais comme le chercheur le rappelle bien, puisque chaque culture appréhende différemment les couleurs, le savoir occidental en la matière n'a pas force de loi. En matière ou en lumière d'ailleurs, car au fil des siècles la couleur s'est vue changer de nature. Celle qui habillait comme une seconde peau est devenue fraction de lumière sous le prisme d'Isaac Newton.

michel pastoureau, pastoureau, michel, couleurs, couleur, théorie, théoricien, jaune, vert, bleu, rouge, noir, blanc, symbole, sens, signification, interview, portrait, rencontre, livre, essai, photoToutefois l'onde et la mesure laissent les hommes de lettres insatisfaits. Un certain Johann Wolfgang von Goethe écrit dans sa Théorie des couleurs en 1810 : "Une couleur que personne ne regarde n'existe pas !" Deux siècles plus tard, les sciences humaines, et Michel Pastoureau avec elles, font leur cette conviction selon laquelle une couleur n'existe que pour autant qu'elle est perçue. Au-delà du pigment, de l'oeil ou du cerveau, la couleur est donc d'abord un fait de société, une palette de codes et de valeurs. En véritable archéologue, l'auteur exhume du nom des teintes l'écheveau technique et idéologique qui les gouverne. Echeveau tentaculaire ignoré de tous, ou presque. A de nombreux égards, Couleurs est donc une immersion en terre inconnue. Valladolid, Djakarta, Angkor Wat, Sardaigne, Chicago, Iles Lofoten de Norvège... Autant d'instants volés à ces contrées plus ou moins lointaines. Et par-dessus tout, autant de couleurs dont il est aisé de sentir qu'elles ne vont jamais sans saveur, sans parfum, ni sans musique ou température. Si beau soit-il, le vert flottant des traces lactescentes d'une aurore boréale dégage volontiers une odeur nauséabonde. Et ce jaune acidulé des panicules de maïs, si dépourvus d'aspérités que l'on croirait à des dragées, n'est-il pas un peu sucré ? Qu'il est bien froid aussi le bleu-gris de l'acier et de la houle de cette plate-forme pétrolifère sur laquelle souffle la mer.

Blanc. D'autres siècles n'auraient rien su dire de ces trois couleurs. D'abord parce que domine pendant longtemps dans de nombreuses cultures, y compris l'occidentale, la triade primitive du blanc, du rouge et du noir, soit le blanc et ses deux contraires. Blanc, inaccessible absolu. Blanc qui fascine peut-être avant tout par l'étonnante pérennité et l'universalité de son symbolisme. Les hommes se sont toujours inclinés et s'inclinent encore devant lui. Dominique Simonet rappelle dans son entretien avec l'historien qu'il est la couleur la plus ancienne, la plus fidèle, celle "qui nous parle de l'essentiel : la vie, la mort, et peut-être aussi (…) un peu de notre innocence perdue" (1). Il vient en hiver couvrir les arbres des campagnes de leur manteau de vieillards, ou paré en tchador au cimetière musulman. Mais il est aussi dans le pavillon de la vague qui fouette le rocher normand, dans cette écume et cette mousse qui ravissent les enfants. D'aucuns disent pourtant qu'il n'est pas une couleur. Il faut rappeler alors que c'est Newton qui, en découvrant le spectre en 1666, a proposé au monde savant un nouveau continuum chromatique au sein duquel sont exclus le noir et le blanc. Mais aujourd'hui, aucun doute, et Michel Pastoureau insiste : le blanc est une couleur. Il est même celle qui polarise, qui "donne leur équilibre, leur valeur et leur beauté à toutes les autres". Il suffit de contempler les courbes souveraines des plaines enneigées de l'Alaska ou du Canada pour être saisi par l'aspect monochromatique qu'il peut prendre. "Aucune autre couleur n'est aussi unie dans la nature", poursuit l'auteur.

Ce n'est peut-être pas un hasard si, en éminent symbole de pureté, l'homme est resté si longtemps sans parvenir à reproduire son absoluité. La blancheur du lait ou du lys demeurait fascinante. Celle du dédale craquelé d'un désert de sel bolivien ne l'est pas moins. De la pureté, la chasteté et l'hygiène sont des variantes bien connues de la société occidentale. Blanc insipide du carrelage sanitaire de ces douches pour mineurs en contrée britannique ou blanc de l'apparat monacal, ici shinto, là chrétien. Car le blanc est aussi michel pastoureau, pastoureau, michel, couleurs, couleur, théorie, théoricien, jaune, vert, bleu, rouge, noir, blanc, symbole, sens, signification, interview, portrait, rencontre, livre, essai, phototranscendant, "c'est la lumière primordiale, l'origine du monde, le commencement des temps", écrit Pastoureau. Bien qu'au revers du symbole rivalisent la matière indécise et "l'écho du monde des morts". Du blanc du linceul au blanc du berceau, il n'y a qu'un blanc.

Rouge. Révolutionnaire, censeur et aguicheur, c'est la couleur archétypale. Tant et si bien que parler de "couleur rouge" frise, pour le spécialiste, le pléonasme. Et d'abord parce que dans de nombreuses langues, "rouge" a signifié, ou signifie encore, "coloré". Aux yeux de l'Antiquité, qui perçoit volontiers le blanc comme l'incolore et le noir comme la salissure, le rouge s'impose comme la seule couleur digne de ce nom. Cette suprématie s'explique surtout par la précocité des performances techniques de l'homme à partir des colorants et pigments offerts par la nature : "Des terres ocres rouges, riches en oxyde de fer, pour peindre et dessiner sur les parois des cavernes ; la garance, le carthame et plus tard le kermès pour teindre les étoffes et les vêtements." Les racines tinctoriales abondent. Le rouge est aussi le sang de la terre. Un peu de sacré, donc, pour cette couleur qui sait aussi être licencieuse.

Michel Pastoureau rappelle ce que les photographies montrent bien : le rouge est sans doute la couleur la plus ambivalente qui soit. Au-delà des officines qui empuantissent les faubourgs, il appartient aux rois ou au Diable, à la charité ou aux guerriers. Orgueilleux, comme lorsqu'il flamboie à l'oeil du perroquet, ou encore puissant, dans ce ciel empourpré de fin du monde ou de premier matin, il porte aussi la chaleur de l'amour et la générosité de la charité. Car c'est aussi un justicier, qui habille une assemblée de magistrats de la Cour Suprême, tout en étant le premier convoqué à la fête, de l'Inde à l'Italie. Le rouge est aussi docte qu'enivrant. Sans doute parce qu'il charrie toujours au fond l'image du vital. Il n'y a qu'à s'arrêter devant le coeur de cette fraise espionné de près pour croire y reconnaître de la chair. Ou des membranes, comme devant les frêles pétales du coquelicot de Cornouailles ou les tulipes du renommé Dennis Stock. Un pétale ou une aile, lorsqu'un modeste papillon, égaré sur le tapis de Cannes dont il partage le rouge, est immortalisé par un photographe. Qui l'aurait peut-être ignoré si ses ailes n'avaient été bordées de noir.

Noir. Le grand damné que les peintres, les premiers, ont réhabilité. Suivis aujourd'hui par un cortège de stylistes, couturiers, designers et autres créateurs. Mais loin de cette scène contemporaine, Michel Pastoureau donne le ton : "Au début était la nuit, l'immense nuit des origines". Des mythes à l'astrophysique, le noir précède la lumière, gagnant ainsi une symbolique particulièrement duelle, aussi matricielle que mortifère. Le noir des origines est fécond. Il annonce la fertilité de la michel pastoureau, pastoureau, michel, couleurs, couleur, théorie, théoricien, jaune, vert, bleu, rouge, noir, blanc, symbole, sens, signification, interview, portrait, rencontre, livre, essai, phototerre, jusque dans ses rides de lave pétrifiée d'Islande ou son basalte littoral gonflé d'embruns. Mais il accompagne aussi bien le satin funèbre de certaines cultures endeuillées. Devant la mort, l'humilité. "L'enfant terrible des couleurs", comme le surnomme Dominique Simonet, s'est particulièrement bien prêté à un certain nombre de vertus, sublimées par la Réforme protestante. Respectabilité, tempérance, le noir porté de l'austérité passe même dans les tranchées de l'autorité ; la robe des juges ou la tenue des arbitres viennent en témoigner.

Mais face à l'orthodoxie, les mouvements extrémistes ont assez bien montré que le noir est aussi transgressif. Sans être fasciste ou anarchiste, il peut être révolté, comme sur ce cliché de Belfast, en cache-nez de l'insurgé irlandais. Un détour vestimentaire qui rappelle que cette couleur sert, enfin, l'élégance. Le bon noir - en latin, niger - est brillant et s'oppose au mauvais noir, l'atrabilaire inquiétant. Être brillant ou mat, "sec ou humide, lisse ou rugueux, tendre ou dur, sourd ou sonore", voilà bien des qualités qui importent peu à l'Occident mais qui sont essentielles en Afrique noire, précisément. "Nos préjugés sociaux se jouent dans le sentiment de notre propre couleur", écrit dès lors l'auteur. Comme son alter, le noir ne se laisse pas facilement atteindre. Bien que "la plupart des noirs fabriqués par l'homme [soient] désormais plus noirs que ceux produits par la nature", ils restent coûteux à produire, et notamment en peinture où l'ivoire calcinée est si convoitée. Difficile d'imaginer pourtant quel noir pourrait défier le charbon du mineur afghan portant sur son visage le masque de son labeur. Et de même densité, le noir meringué des sables volcaniques, ou pis, la robe tristement laquée d'un oiseau prisonnier du mazout. Mais qu'il se console, si le noir est l'empereur des soirées mondaines, il ne règne pas seul. Un bleu n'est jamais loin.

michel pastoureau, pastoureau, michel, couleurs, couleur, théorie, théoricien, jaune, vert, bleu, rouge, noir, blanc, symbole, sens, signification, interview, portrait, rencontre, livre, essai, photoBleu. Plus consensuel, il est à consommer sans modération. En Europe du moins, où près de la moitié des citoyens le donnent pour leur couleur préférée. D'autres traditions lui réservent un traitement sensiblement différent. Rejeté ou méprisé en Asie, il est la couleur de la caste indienne la plus basse, les sudra (intouchables), celle du deuil de Turquie ou de la minorité chrétienne en terres d'Islam. Cette soif de classification n'est pas également partagée par toutes les sociétés. Et d'autant moins à l'endroit du bleu, dont l'histoire est celle du premier parvenu. Longtemps silencieux jusque dans le lexique latin où il ne trouve guère de'équivalent, le christianisme médiéval le pousse soudainement sur le devant de la scène. Dans le jeu hiérarchique des identités, Dieu devient lumière. "Et la lumière devient… bleue !", raconte Michel Pastoureau. La teinte s'offre alors une nouvelle vie. La grande absente, celle qui fut le plus boudée, envahit bientôt les cieux et les flots. Et elle le peut, si prégnante mais si apaisée dans ce dôme crépusculaire à Tokyo. Ou iodée, tirant sur le gris-vert dans cette station balnéaire désertée en hiver.

Fixé dans l'iconographie liturgique, le bleu a intégré un système de valeurs et s'est posé en nouveau contraire du rouge. Mais jamais, en Occident, il ne stigmatise. Il éclate dans les vitraux gothiques, fait son entrée en politique en parant le roi de France, avant d'inonder la Réforme, qui en fait une couleur honnête. La guerre des bleus s'annonce : pastel européen contre indigo exotique. Et aucun n'a gagné ni perdu. L'un vient aux casques des Nations-Unies, l'autre électrise les palmes du fou de Bassan des îles Galapagos ou donne du piquant au lavoir de New Delhi. Le bleu n'est pas toujours docile ou discipliné. Et souvent la nature donne tort de l'avoir ignoré. Limpide et ensommeillé sur le lac que quelque plongeur nu ne résiste pas à briser, il aime aussi l'artifice des perruques ou le coton des jeans. Il était trop tôt pour que le jeune Werther en fasse son habit, mais le héros de Goethe inspire le romantisme de Novalis. Entre le rêve et la mélancolie, le "blues" se cherche un partenaire. Pourquoi pas le vert ?

Vert. Ce chlorophyllien, aujourd'hui encensé et labellisé, partage avec son voisin une nature médiane qui fait de lui une couleur non violente. Mais il n'a pas toujours été aussi sage. Michel Pastoureau signale que jusqu'au XVIIe siècle, le vert est, au contraire, turbulent et excentrique. Il est surtout particulièrement versatile. Facilement obtenu à partir de nombreux végétaux - ortie, nerprun, aulne, etc. -, il est longtemps resté chimiquement instable. Il tient mal aux fibres en teinture, s'use à la lumière en peinture. Trop éphémère, ce vert, pour ne pas éveiller les soupçons. Sa symbolique michel pastoureau, pastoureau, michel, couleurs, couleur, théorie, théoricien, jaune, vert, bleu, rouge, noir, blanc, symbole, sens, signification, interview, portrait, rencontre, livre, essai, photos'organise donc presque entièrement autour de ce qui change et ne dure pas, la chance et le jeu, comme dans un gazon bien rasé, discret tapis des tournois chics ; la jeunesse et l'espérance, dans le drapeau dont se couvrent les supporters mexicains. Jeunesse aussi trahie par son manque de maturité, jusque dans le fruit ou les épis de blé, dont les photographes aiment tant saisir la vulnérabilité.

Il est admis que le vert est la couleur de la nature parce qu'il y est omniprésent. Mais d'après l’historien, c'est sans doute à l'Islam primitif, plus qu'à l'époque romantique, que l'on doit leur première association. "A l'époque de Mahomet, tout endroit verdoyant était synonyme d’oasis". La pellicule déroulée par Pastoureau prouve en tout cas assez combien l'homme n'a rien inventé, pas même le vert le plus fluorescent. Ce vert-là, les formations salines et sulfurées du cratère éthiopien s'en sont déjà occupées. Tandis qu'à l’autre bout du spectre se rencontre un vert vieillissant, éteint des moisissures ou des murs publics tenus de rester muets. Qu'elle soit vigoureuse ou maladive, la couleur verte fut l'expatriée de la science et des écoles picturales qui s'en réclamaient. Parce que ravalée au rang de couleur complémentaire face au rouge, jaune et bleu primaires, elle déserte certains mouvements du design ou les toiles d'un Mondrian. Du plus lumineux au plus insolite, flottant dans la mousseline de soie des défilés mondains. Ou s'évaporant ailleurs, d'humeur humide à la surface du marais. Le vert n'est pas toujours l'allié des lieux bien fréquentés. Mais il en est un qui ne semble pas fréquentable : le jaune, lui, souffre de tares dont il a bien du mal à s'expliquer.

Jaune. L'étranger. Celui à qui l'or a ravi son prestige depuis le Moyen Âge, absorbant les symboles positifs de la lumière et de la puissance. Aujourd'hui mal-aimé, le jaune ne l'a pas toujours été. Les peuples de l'Antiquité révérent en lui le soleil et lui accordent une place importante dans les rituels religieux. Mais l'imagerie médiéval le dépossède de ses vertus et en affuble tous les faussaires. "Cette idée de l’infamie a traversé les siècles", constate Michel Pastoureau. Pourquoi le mensonge ? La réponse est étonnante car, selon l'historien, rien ne michel pastoureau, pastoureau, michel, couleurs, couleur, théorie, théoricien, jaune, vert, bleu, rouge, noir, blanc, symbole, sens, signification, interview, portrait, rencontre, livre, essai, photol'explique de façon suffisamment probante. Ni les éléments qu'il évoque, ni sa fabrication : "On obtient le jaune avec des végétaux telle la gaude, une sorte de réséda qui est aussi stable en teinture qu'en peinture le sont les jaunes fabriqués à base de sulfures tel l'orpiment ; le safran (…) a les mêmes qualités : la teinture jaune tient bien, elle ne trahit pas son artisan", explique l'auteur à Dominique Simonet.

Et les jaunes rassemblés à l'occasion du recueil continuent de donner peu de motifs d'accusation. Du ballet des taxis new-yorkais au bonnet du jeune Sikh écolier, la couleur saisit le regard avec franchise. Elle attendrit, aussi, dans la pâleur des coings boursouflés. Et bouleverse, en compagne automnale des bouleaux du Colorado ou du lichen agrippé au pavé. Seuls les impressionnistes, Van Gogh et ses tournesols, l'aiment à nouveau. Une conversion du regard que reprennent certains univers sportifs, peinturlurant leurs maillots ou le visage d'un public. Mais c'est l'Amérique du Sud, en bon géant, qui montre le plus grand engouement. Plus criard que jamais, le jaune y est de toutes les fêtes. Du carnaval de Rio à celui de Notting Hill, d'ailleurs, il se glisse entre les paillettes et, luxuriant, s'offre les apparats des cabarets. L'or peut bien pleurer, le jaune a les épices et le sirop de la fleur de gingembre, le labyrinthe des saris râjasthânis et la mer de colza. Il se taille même une part de poésie dans une pluie de ballons en Italie.

Mais peut-être les rivaux de toutes ces couleurs sont-ils ailleurs ? Les seconds couteaux rose, orangé, marron, gris et violet n'ont pas dit leur dernier mot. Les six couleurs retenues par Michel Pastoureau le sont pour n'avoir pas de référent. Elles existent sans fruit ou fleur pour les nommer. Pour certaines moins fréquentes dans la nature, les "demi-couleurs" ont souvent été fabriquées jusqu'à l'écoeurement et ne sont plus synonymes que de vulgarité. Seul le gris tire son épingle du jeu. S'il convoque l'ennui et la tristesse, il raconte aussi la vieillesse, sa connaissance et sa sagesse. Tout ce qu'un test d'optique n'observera jamais. Devant l'épaisseur et la duplicité des couleurs, rien ne vaut encore du regard la spontanéité.
 
Marion Genaivre
Le 23/04/11
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Couleurs

Michel Pastoureau
Editions du Chêne, Paris
2010
480 pages
45 €

(1) Le petit livre des couleurs, Michel Pastoureau et Dominique Simonet, Paris, Editions du Panama, 2005, p.45.

 
Cet article fait partie du Dossier couleurs







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